Forum kuentz.com

Nous allons nous rendre maintenant dans deux endroits encore peu fréquentés et difficiles : Jabal Mtoloh et Hageher Meheni. Nous camperons là au pied de Mtoloh. De superbes Aloe perryi en fleurs font de cet endroit un lieu magique.
Jabal Mtoloh est une montagne qui culmine à près de 800 m d’altitude. N'y monte pas qui veut : il faut demander la permission au chef du village local...

Un Socotri, Abu Seliman, y fait paître ses chèvres au sommet, et il est d’accord pour nous montrer le chemin, un chemin difficile au bord d’un vertigineux précipice.
Le sacrifice en vaut la peine : à partir de 500 m d’altitude, on découvre les premiers Aloe jawiyon. C'est là où ils ont été découverts pour la première fois.

Certains sont en fleurs. Les plantes ont un épiderme caractéristique et une floraison orange. C’est une espèce qui a été récemment décrite en 2004.
Des buissons d’une Scrophulariacée, Campylanthus spinosus apparaissent...

Dans une cavité de la roche, de nombreuses petites espèces ont trouvé refige, ici la jolie Cyanixia (ex Babiana) socotrana, de la famille des Iridaceae.

Une rare succulente dans une fissure, de la famille des Caryophyllacées : Gymnocarpos kuriensis. C'est une espèce que l'on a d'abord trouvé sur l'île d'Ab-del-Kuri, puis découvert sur Socotra; très succulentes, les feuilles présentent un mucron caractéristique.
JL

Une surprise nous a été réservée sur le chemin : dans une anfractuosité du calcaire, une petite orchidée est en fleurs : Habenaria socotrana.

Quelques arbustes en pleine végétation, Jatropha unicostata, avec des feuilles toutes fraîches magnifiquement nervurées, en fleurs et en fruits.

Sachant que Abu Seliman fait le chemin tous les jours pour aller voir ses chèvres, je le surnomme Abu Superman, ce qui plaît beaucoup à Ahmed, mon guide ! Mais gravir le Jabal Mtoloh pour moi, n'est pas si simple, à cause de mon problème cardio-vasculaire.
Il faut y aller doucement !
...
Joël Lodé

Nous arrivons exténués vers le sommet de Jabal Mtoloh : là est le but de notre ascension : il ne nous faut pas longtemps pour la rencontrer, car elle est en fleurs. Ses fleurs jaune vif la trahissent, bien que la plante est le plus souvent enfouie dans une fissure ou sous un arbuste. Il s’agit de la superbe Socotrella dolichonecma, décrite en 2002 et que peu de personnes ont vue dans l’habitat. Abu Seliman en arrache un morceau : « mes chèvres ont pratiquement tout mangé ! » Elles ne sont pas les seules et lui-même ne dédaigne pas non plus en faire un plat ! De fait, au sommet, nous ne trouverons rien d’autre que ce seul pied !

Sur le chemin, au bord du précipice, nous croisons un buisson de Euphorbia spiralis, la seule plante que nous ayions trouvé qui justifie son nom !

C'est également ici que j'ai trouvé une nouvelle espèce d'euphorbe, Euphorbia que j'ai nommé mtolohensis, puisqu'on ne la trouve que sur cette montagne. Très compacte et basse, Euphorbia mtolohensis s'est adaptée aux vents violents qui soufflent 6 mois de l'année...

Joël Lodé

Euphorbia mtolohensis est un buisson assez dense, avec des tiges fines de la taille d'un gros crayon.
Les inflorescences sont petites, à bractées vert pâle ; l'inflorescence de gauche est femelle, celle de droite, plus enfoncée est mâle.
Les capsules sont violettes à brunes.
...

Il y a encore d'autres espèces à découvir ; celle-ci est peut-être aussi une nouvelle espèce ; cette plante est cristée.

Durant la descente, nous retrouvons quelques pieds de Socotrella dolichonecma, bien enfoncées dans les rochers calcaires recouverts de lichens, seule protection efficace contre les chèvres gloutonnes (et leur propriétaire !)...
JL

Cette Socotrella dolIchonecma ferait bien mon affaire, les fleurs sont originales.
Le buisson d'Euphorbia spiralis est impressionnant et les vues incroyables.

Quelle végétation extraordinaire !
Encore merci Joel de nous montrer comment ces plantes étonnantes se sont adaptées à leur milieu, en occupant le moindre interstice un peu plus confortable ou en adaptant leur formes ou leurs couleurs aux difficiles condition de (sur)vie !