Un peu plus loin, le terrain semble redevenir propice aux cactus. Un nouvel envahisseur occupe une place dominante dans cette zone : Opuntia monacantha. Cette espèce, contrairement à Opuntia rastrera et Opuntia stricta, est peu rustique. La douceur de l'endroit l'a manifestement poussé à sortir d'un jardin pour coloniser la côte. Elle pousse à toute allure et forme des massifs énormes, couverts de fruits. Même l'Agave americana 'Picta' se fait écraser par le poids des branches d'Opuntia monacantha !
On trouve également au même endroit des Sedum praealtum très vigoureux, mais ils ont un peu de mal à émerger des Opuntia !
Un Opuntia monacantha à la conquête d'un rocher. Les fruits verts et les articles cassés par le vent ou les passants vont tomber au sol et donner naissance à de nouvelles plantes.
Alors que nous désespérons un peu de trouver autre chose que des Agave et des Opuntia, nous tombons sur une haie d'Aloe arborescens en fleurs. Les photos datent du mois de décembre. Quel beau temps pour la saison, me direz-vous ? C'est l'avantage d'habiter sur la Côte Varoise !
Voici enfin une « vraie » Agave americana 'Marginata'. Notez la différence de teinte des feuilles par rapport à la photo précédente.
Les Yucca sont également présents sur notre chemin. Yucca gloriosa est une espèce très commune, rustique dans toute la France, qui forme des touffes de 1,50 à 2 mètres de hauteur. Les gros sujets peuvent fleurir plusieurs fois par an.
Nous rencontrons une autre espèce de Yucca beaucoup moins rustique : Yucca elephantipes. Il s'agit du Yucca vendu ordinairement comme plante d'appartement. Ce sujet implanté en pleine terre s'est bien développé et mesure 3 mètres de hauteur. Mais cette espèce peut atteindre facilement le double !
Nous ne trouverons pas d'autre espèce succulente ou xérophyte jusqu'à notre destination finale. Le paysage n'en reste pas moins intéressant, avec cette pierre noire à la structure très fine, que l'on ne rencontre que dans la calanque de « Pierre Blave ».
Quelques hectomètres plus loin, nouveau changement de décor avec ces gros blocs de pierre gris clair complètement disloqués par le temps. Un spectacle étonnant et d'une grande beauté.
Peu avant le Cap Dramont, voici l'Ile d'Or, surmontée de sa tour carrée. Hum... Elle ne vous rappelle rien ? Cherchez bien dans vos lectures de jeunesse...
Après un secteur très accidenté et balayé par les vagues, puissantes à cet endroit, nous arrivons sur la plage du Débarquement...
C'est là que les Alliés posèrent le pied le 15 août 1944 pour libérer le sud de la France. La plage est constituée de galets d'estérélite ou porphyre bleu de l'Estérel, une roche extrêmement dure que l'on ne trouve que dans l'Estérel et en Suède. Mais le gisement n'est pas situé en bord de mer, et les galets ne sont pas venus là tout seuls ! L'estérelite était utilisée autrefois pour fabriquer des pavés, notamment ceux qui garnissaient les rues de la ville de Paris. Ces blocs taillés provenaient de gisements situés à quelques centaines de mètres de la plage. Pour charger les bateaux, on utilisait un embarcadère aujourd'hui disparu. Au cours de l'opération, des pavés tombaient à la mer, et c'est ainsi que, petit à petit, les pavés transformés en galets par le roulement des vagues ont recouvert toute la plage.
Et photographiée ainsi, l'Ile d'Or ne vous fait-elle pas penser à l'Ile Noire de Tintin ? On dit que Hergé s'en est inspiré, mais ne serait-ce pas une légende ? Pour l'anecdote, la tour a été construite il y a un siècle par un original, le Dr. Lutaud, qui s'était autoproclamé Roi de ce minuscule territoire. Il organisait des fêtes auxquelles participait tout le « gratin » de la Côte d'Azur !
Nous voici arrivés au terme de notre balade mi-touristique mi-botanique: le petit port du Poussaï, au pied du Cap Dramont, surmonté de son sémaphore. Si vous avez encore des jambes, il est possible d'en faire le tour. Mais gardez des forces pour le retour …
© Henri Kuentz 2001